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maben, Konen. Ke 1400
#2““ par Arthur SCHNITZLER
Arthur Schnitzler est un grand écrivain, une
des gloiresde-P’Astriche-litteraire, la seule Au¬
triche qui ait pu surnager à la debücle épou¬
kantable de ce pays, depuis In guerre.
Ou conhaissalt in pen Schnitzler, mais mal.
On conhaissalt surtont Fauteur dramatique. II
Pavait bien ga et là dans des Revues quelque
Conte, quelque honvelle de Jni, mais perdus an
milien de sommaires souvent fort ennugenx.
Bebets #olb Tir 18%
Quelques pièces avaient été traduites; Anaio¬
le, La Ronde, pièces curieuses, d’une fac¬
füre öriginale, murquée du seeau d’une forte
personnalité, mais elles ne donnaient qufune
dée assez incomplete dercet asteur. Cortes, il
y apparaissait un erivain puissant, un réaliste
de grande classe, mais assez dépourvu de sen¬
sibilité. Or, Schnitzler n’en est point dépourvu.
Loin de lä. Et il faut remercier MM. Alzir Hel¬
la et O. Beurnac d’avoir traduit Mourir qui
est une cuvre humaine de ia plüs grande qun
ité, d’une richesse d’emotion que nul ne peut
PETTRES, SCiENcxs Er ARTS
nier. A notre sens, c’est par cette ceuvre qu'i
edt fallu introduire Schnitzlei chez nous au lien
de sulvre, comme on le fit, un certain snobis¬
La Nouvelle Revue, dans l’intéressante rubrique
me qui, en fin de compte, n’arriva qu'à desser¬
vir l’écrivain.
qu'elle consacre, chaque quinzaine, au möuve¬
Je ne sais si Mourir est son chef-d’auvre
ment littéraire et artistique à l’étranger, signale
on dit grand bien du Retour de Lüsanova que
nous aurons la joie de lire bientôt, croyons¬
tout particulièrement un roman de M. Arthur
nous, mais ce que je sais, c’est que Mourir est
Schnitzler, Mourir, dont la traduction vient de
un livre poighant, cruel de vérité, mäts un li¬
paraitre en français. L’écrivain viennois est,
vre ému aussi.
C’est le récit d’une agonie et peut-être n’s¬
comme la plupart des jeunes littérateurs alle¬
vions-nous lu, jusqu'ici, dans ce ton et avec cet
mands, partisan de l’imitation directe de la réa¬
accent que les pages trop courtes de Mécislas
liré; comme eux et sans doute par leur intermé¬
Golberg, T'admirable Disgräce couronnée d’epi¬
nes, les pages dans lesquelles l’auteur du Pro¬
diaire, il a subi l’influence de Dumas et de Bour¬
méthée repentant consignait les dernières heu¬
get, de Zola et de Maupassant. M. Schnitzler n’a
res de son agonie propre.
Mourir nous dépemt la tragédie d’une couple
pas dépassé la trentaine; son cuvre n’est donc
Félix, tuberculeux, Marie, saine filie bonne et
pas encore considérable; elle se compose d’un
Eévouée; ils s’aiment, mais la maladie est là,
recueil de saynètes, paru sous le titre: Anatole,
entre eux, qui fait des progrès rapides et, en
mème temps que le malade, c’est leur bonheur
de deux pièces en trois actes, le Conte et Amou¬
à tous deux qu'elle ronge comme un cancer.
rette, et du roman qui vient d’étre traduit. La net¬
Lui est un intellectuel, donc un hypersensitit.
Aussi souffrira-t-il d’autant plus terriblement
teté et la concision sont les qualites maitresses de
dans son mal qu’il aura la certitude d’avoir à
l’écrivain; son roman, bien que l’intérêt en
quitter bientôt ses raisons de vivre et sa vie.
soit tout psychologique, n’est pas encom¬
Son amie, de son côfté, se laissera aller à l’es¬
poir, elle tentera de ranimer l’espoir chez le
bré d’analyses copieuses ou pédantes; c’est
malade. Elle l’aime tant qu'un jour elle jurera
une suite de tableaux précis et simples, ou
de ne pas lui survivre. Et apres l’avoir vu d’a¬
bord lui demander de le quitter, on verra le
rien n’est inutile. La simplification est d’ail¬
malheureux exiger d’elle qu'elle meure nvec lui.
leurs la préoccupation constante et croissante
En vain voyageront-ils,le mal ira empirant. Plus
de M. Schnitzler: sa première pièce, le Conte,
a lin approche, plus le moribond songe d ne
pas partir seul, plus la jeune famme se tour.
appartenait à l’école d’Alexandre Pumas; sa
nera vers la vie, résistera de toute la force de
seconde, Amoureffe, est unc pièce du Théätre¬
vitalité qulil y a en elle.
Libre, qui dédaigne, peut-étre avec excès, le fa¬
Cet appel de la vie, ils le comprendront tous
les deux et cela fera que, peu à peu, ils devien¬
meux # art des préparations n, mais qui vaut par
dront l’un pour l’auire comme deux ennemis.
la vigueur et la clarté du dialogue. L’auteur y sa¬
Malgré toul, la pitié de la jeune femme ne se
relächera pas. Elle supportera jusqu'au bout
erifie parfois ce qu’on est convenu d’appeler la
ceite lente desagrégation de ce qui fut leur
g rosserie ); mais ce genre d’ironie brutale et
banheur. La peur ies hante tous deux. Lui.
sans gaieté ne parait pas jui étre naturel, si l’on
qu'elle s’en aille; elle, qwr’il la tue; c’est unc
utte perpétuelle contre l’angoisse chez l’un et
en juge per quelques-unès de ses premières
chez l'autre. Un jour, Marie eut juste le temps
saynètes, véritables bijoux de délicatesse, d’esprit,
de fuir, il avnit retrouvé sa force et tentait un
l’étrangler sentant sa dernière heure venir.
de verve légère et rieuse.
Elle s’élait échappée à temps. Ces scènes atro¬
ces sont traitées avec une maitrise remärqua¬
ble et la simplicité de la langue, la nudité plei¬
ne d’art et de l’art le plus vrai, contribuent à
les rendre impressionnantes jusqu'aux exire
mes possibilftés.
Mouri est un livre de toute beauté. Mieux
que sur ce résumé forcément suceinct, nous lais.
serons le lecteur juger des mérites de ce roman
sur les quelaucs pages que nous en détachons
— Henry POULAILLE.
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