35. Therese
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box 6/2
THERESE OU LES AMOURS VIENNOISES. 433
vieux manuscrit que l’auteur aurait retrouvé naguère dans ses
tiroirs. Celte Thérése, en effet, sans étre le moins du monde un
roman historique, nous transporte en arrière asscz loin du
présent, dans un monde d’hier qui déja commence à nous
apparaitre dans une persperlive poctique. C’est unehisloire d’un
passé tout proche et pourtant aboli, une histoire de la jolie
Vienne d’autrefois, la Vienne d’avant les malheurs, la Vienne
de ce temps dont on dit & C’était le hon temps v: les fiacres
goguenards et philosophiques dans les rues, les équipages sur
le Hing, les courses de la Freudenau, les canotages sur les
petits bras du Danube.
En général, scit paresse, soit goüt, l’auteur répugne aux
grands efforts et aux ouvrages de longue haleine. Le roman
effraie sa nonchalang II n'avait fait encore en ce genre qu'un
seu livre, d’ailleurs magnisique, une sorte d’Education senti¬
mentale, l’amour libre et la question juive (on sait que
M. Schnilzler est d’origine israélile), un de ces livres ou un
homme verse toute son expérience. L’auteur v abordait ce point
central de son cuvre, le problème du rapport des sexes et de la
destinée de la femme. On peut croire que l’idée de son nouveau
roman est contemporaine du premier. La triste aventure de
Thérèse Fabiani compléte la mélancolique histoire d’Anne
Rosner. On s’explique que l’héroine ait conservé l’atmosphère
du temps ou elle a vécu: c’est une ancienne compagne de la
jeunesse de l'auteur. Sans la décrire, rien que par sa date, nous
savons la femme qu'elle était: jupes longues, cheveux longs,
la taille pincée par le corset, de la pointe de ses bottines
jusqu'à la forme du chapeau, depuis les froncés de la robe et de
l’ombrelle jusqu'á son linge et à ses dessous, sa silhouette nous
est familière comme celle d’une figure de Maupassant ou de
Bourget; d’avance nous connaissons ses gestes, sa démarche, la
qualité de créature, l’ensemble de sentiments féminins qu’elle
représente.
Sans qu’ily paraisse, M. Schnitzler, cet ancien humoriste
ou cel s auteur gai n, comme nous dirions, est peut-être
aujourd'hui ce qu'il ya de plus classique en Allemagne, j’en¬
tends classique à l'allemande, qui n'est pas tout à fait la
manière française: c’est une façon de conter, un art de
conduire le récit d’une manière paisible dans un long dérou¬
lement de temps (qui embrasse, dans Thérése, une durée d’une
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THERESE OU LES AMOURS VIENNOISES. 433
vieux manuscrit que l’auteur aurait retrouvé naguère dans ses
tiroirs. Celte Thérése, en effet, sans étre le moins du monde un
roman historique, nous transporte en arrière asscz loin du
présent, dans un monde d’hier qui déja commence à nous
apparaitre dans une persperlive poctique. C’est unehisloire d’un
passé tout proche et pourtant aboli, une histoire de la jolie
Vienne d’autrefois, la Vienne d’avant les malheurs, la Vienne
de ce temps dont on dit & C’était le hon temps v: les fiacres
goguenards et philosophiques dans les rues, les équipages sur
le Hing, les courses de la Freudenau, les canotages sur les
petits bras du Danube.
En général, scit paresse, soit goüt, l’auteur répugne aux
grands efforts et aux ouvrages de longue haleine. Le roman
effraie sa nonchalang II n'avait fait encore en ce genre qu'un
seu livre, d’ailleurs magnisique, une sorte d’Education senti¬
mentale, l’amour libre et la question juive (on sait que
M. Schnilzler est d’origine israélile), un de ces livres ou un
homme verse toute son expérience. L’auteur v abordait ce point
central de son cuvre, le problème du rapport des sexes et de la
destinée de la femme. On peut croire que l’idée de son nouveau
roman est contemporaine du premier. La triste aventure de
Thérèse Fabiani compléte la mélancolique histoire d’Anne
Rosner. On s’explique que l’héroine ait conservé l’atmosphère
du temps ou elle a vécu: c’est une ancienne compagne de la
jeunesse de l'auteur. Sans la décrire, rien que par sa date, nous
savons la femme qu'elle était: jupes longues, cheveux longs,
la taille pincée par le corset, de la pointe de ses bottines
jusqu'à la forme du chapeau, depuis les froncés de la robe et de
l’ombrelle jusqu'á son linge et à ses dessous, sa silhouette nous
est familière comme celle d’une figure de Maupassant ou de
Bourget; d’avance nous connaissons ses gestes, sa démarche, la
qualité de créature, l’ensemble de sentiments féminins qu’elle
représente.
Sans qu’ily paraisse, M. Schnitzler, cet ancien humoriste
ou cel s auteur gai n, comme nous dirions, est peut-être
aujourd'hui ce qu'il ya de plus classique en Allemagne, j’en¬
tends classique à l'allemande, qui n'est pas tout à fait la
manière française: c’est une façon de conter, un art de
conduire le récit d’une manière paisible dans un long dérou¬
lement de temps (qui embrasse, dans Thérése, une durée d’une