I, Erzählende Schriften 31, Fräulein Else, Seite 109

31. Fraeulein Else
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##. Uniquement au service de l’intèret general ))
Tagl 1299. — 1929.
N 530. — 25.
—.—
EES LIRLS
OUI FONT PENSER PE

GUBBIAH
„MADEMOISELLE ELSE
par Jean MARTEL
par Arthur SCHSTTZLER
(Albin Michel, éditeur; prix): 42 francs)
(Librairie Stock; prix: 12 franes)
TRAN MakrEt. a débuté par un maitre roman, Marion des
ERTAINs auteurs de langue allemande, qui jouissent
Weiges, analysé ici mème et qui, si mes souvenirs
dans leur pays d’une solide renommée, sont encore
sont exacts, compta parmi les favoris du Prix Goncourt.
presque inconnus en France. Et inversement. C’est que
Gubbich, son deuxième livre, se déroule dans les
e choix des traductions est encore fort arbitraire. Un
mèmes décors que le premier, c’est-à-dire autour
scandale, une mode fugitive, une vague de snobisme, en
d’Aklansas, dans ie Nord américain, au pays des soli¬
déeident souvent. Je crois qu'un e rapprochement franco¬
ludes glacées ei des forêts sans fin, des trappeurs et des
allemand P entre éditeurs permettrail de découvrir et
de combler bien des lacunes.
Indiens. Mais, sur ce fond pittoresque, se détache une
tres forle élude de caräctère.
Précisémenl parce quelce choix est#cncore assez fan¬
Gubbiah Quiltsgaard a trente, ans. C’est. un réveur,
taisiste, on doit se féliciter de le voir se porter sur des
un velleitaire, un maladroit, un inadapté. Sa vie niest
ouvrages comme ceux d’Arlhun Schnitzler auteur jus¬
qu'une suite de mésaventures. En voici un exemple.
lement célehre en Aütriche et en Allemagne. Je liens
Contraint à des métiers d’homme de peine pour nourrir
son, livre Mademoiselle Else pour une manière de chef¬
sa femme et son enfant, il est sans cesse renvové pour
deuvre.
g incapacité, stupidité, insolence v. Enfin, il entre à
Mile Else est la fille d’un avocat viennois, célehre,
’écaillage dans une usine de conserves de poissons. Au
mais prodigue et léger. Elle accompagne sa tante dans
bout d’une semaine, eroisant an seuil une grande fllle
un palace de montagne, à San Martino. Elle F reçoit de
blonde, il Jui dit que ses veux verls et rapprochés lui
sa mère une lettre par exprès: son père a disposé de
font une téie de renard. C’est la fille du pairon, II est
biens de mineurs; il lui faut trente mille florins avant le
cohgédié sur-le-champ.
suriendemain midi; sinon c’est l’arrestation, le suieide;
Autre exemple. Près de mourir, le père de Gubbiah,
leur ami M. de Dorsday séjourne dans le meme palace, à
un vienx trappeur, fait appeler son fils et lui legue une
San Martino; Else ne pourrait-elle pas lui demander
celte somme?
mart ingale pour la roulette, Veillant au coin de l’ätre,
Gubbiah allume distrailement sa pipe avec ce papier.
M. de Dorsday, riche antiquaire sur le retour, admire
Affolé, il l’avoue au moribond, qui trépasse de fureuren
fort Mlle Else, II lui prétera les trente mille francs à la
Je traitant d’idiot.
condition qu'elle lui apparaisse sans volles. Rien de
plus, rien de moins. Elle est prise dans l’allernative,
Les gestes de Gubbiah sont déplorables, mème lors¬
ou- d’accepter l’odienx marché, ou de laisser son père se
qu'il est animé des meilleures intentions. Bücheron dahs
les forêts de l’Ouest, il s’est allaché à ses compagnons.
Par une froide nuit ou ils sont à la ville voisine, il les
Après le diner, elle descend dans la salle de musique,
attend au gile commun, II entretient une belle flambée
laisse tomber son unique vétement et s’évanouit. Ainsi
afin qu'ils se réchauffent au retour. II met le fen à la
M. de Dorsday devra payer les trente mille florins:
naison et à la forét.
Transportée dans sa chambre, Mlle Else, qui a repris
conscience, profite du premier instant de solilude poun
Gubbiah porte malheur méme à ceux qui s’attachent
s’empoisonner avec du véronal.
à Jui. II lui reste à la jambe une mauvaise brülure,
après l’incendie de la feréi, II est soigné, guéri, par dés
Presque en mème temps que Mademoiselle Eise,
Indiens. Mais Pluie-du-Soir, la fille du chef, s’éprend de
paraissait une fraduction d’un autre ouvrage du mème
Gubbiah. F# lorsqu’il doil la quiller pour rejoindre
anteur, Madame Beute et son fils (1). Là encore, les
son foyer, elle resie frappée de folie.
leux prineipaux personnages courent à une morl, con¬
sentie. Mais Mademoiselté Eisé me parait bien plus
Cependant un viell Indien a initié Gubbiah à l’art de
pathétique et plus angoissanl.
sculpter le bois ei la pierre. Sa vocation se révele. 1l est
né sculpteur, Sera-cesle salut? Non. Lä encore, Taven¬
C’est que la forme de ce roman est irès particulière,
ture tourne tragiquement. Chargé d’exécuter pour une
II convient d’y insister. Entre le moment ou Mlle Else
eglise la staluelte d’une sainte, il prend pour modèle
egoit la lettre de sa mère et celui ou elle s’empoisonne,
la bohémienne Trinidad, II quille lout pour elle, la suit,
trois heures seulement s’écoulent. Or, pendant ces trois
tue dans un duel au couteau son rival Pepe, s’enfuit
heures, T’auteur enregistre sans commentaires toutes les
pour échapper à la vindicte des bohemiens et périt de
pensées de la jeune fille. Toutes, Le livreese compose
froid avec sa maitresse.
iquement de cette suite de pensées, on rculent péle¬
mele de tragiques débats, de fines malices, des révoltes,
Ainsi finit l’inapte Gubbiah, à qui la loi du travail
des sonvenirs, des obsessions, des traits mondains, et
élait insupportable et qui jugeait ele monde trop pelit
loute une agonie. C’est un film mental pour ainsi dire
pour lui v. La vie, qu’il a méconnue, se yenge de Jui.
sans précédent.
Jean Martel, sur un fond de décors exceptionnels, a
MICHEL CORDAY.
peint une figure de tous les temps et de tous les pays:
une toile nouvelle au Musée des types humains.
(1) Editione Victor Attinger.
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