VI, Allgemeine Besprechungen 2, Ausschnitte 1909–1912, Seite 46

2. Guttings
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tations certaines des admirateurs du poôte
viennois — par les piéces de Schiller, telles
que Wallenstein. Fiesque on Von Carlos. Le
coloris, les tendances du Jeune Medard, sont
tout à fait dissemblables, it est à peine be¬
soin de le dire; mais Tonvrage appartient
quand mème à ce genre dramatione un pen
démodé qu'illustra jadis le grand talent des
Schiller, des Kleist, des Grillparzer., et aul
tres eélébrités duthéätre allemand. Aprésled
rapides et saisissantes pieces ultra-modernes
dArthur Schnitzler et de ses disciples. Voici
de nouveau, comme au temps lointamn et meil¬
lleur des grands idéalistes septentrionanx,
comme à l’époque ou forissaient à la fois la
poésie romantique, la philosophie transcen¬
dantale et la douce réverie tudesque, voici
que triomphe une pièce interminable, en
quinze tableaux, qui dure eing heures et
comporte soixante-cing personnages!
L'anachronisme est voulu, certes, mais
tout à fait plaisant.
Et cette piece qui exige un grand offort
d’attention et de patience, qui contrarie
toutes les habitudes du public actuel, obtient
néanmoins un succès sans précédent; tout
Vienne en raffole et co scra aussi en librai¬
rie, on peut le prédire des à présent, un
triomphe paradoxal, mais certain, II nous
semble opportun d’en rechercher, d’en indi¬
quer brievement les causes un peu mysté¬
rieuses.
Certes, la réalisation théätrale du drame
de M. Schnitzler cofltribue énormément à sa
réussite exceptionnelle. Le Jeune Médard est
joué au Burg-Teater qui reste toujours, quoi¬
que prétendent ses détracteurs, le premier
théätre littéraire, non seulement de la capi¬
tale autrichienne, mais de tous les pays ger¬
maniques en géneral. Cest là une admirable
institution d’art on le respect de la tradition
n’empéche nullement l’initiative la plus in¬
telligente et la recherche la plus rationnelle
du progrés. Lart de la mise en scène et
de l’interprétation est parvenu vraiment à
une sorte de perfèction relative dans cet il¬
lustre théätre qui exerca de tout temps unc
influence énorme sur l’évolution do Tart
dramatique, do la poésic et des lettres en
Autriche.
Mais il yaen déjà souvent des piéces ad¬
mirablement jonées et montées an Burg¬
Ceater! Les prödiges accomplis par la direc¬
an et les artistes de la célehre compagnie
sauraient expliquer, en tout cas, le reten¬
Ftissement littéraire provoqué par l’ouvrage
d’Arthur Schnitzler.
La donnée initiale de l’ouvre ne brillo ce¬
pendant ni par la nouveauté, ni par l’im¬
prévu. En offet, si on l’examine dans ses
traits essentiels, cn le dégageant des trois ou
quatre intrigucs accessoires qui l’accompa¬
gnent et ralentissent trop souvent l’action, le
sujet de cette chroniquc historique se ramene
à l’éternelle histoire d’unc conspiration ma¬
lencontreuse. Dans combien de drames, de
comédies et de romans avons-nous assistó
aux mancuvres de conspirateurs ayant juré
la perte de Napoléon, alors que les victoires
du Cesar moderne asservissaient I’Europe
entière, fremissante de révolte et de rancune.
Le héros de Schnitzler vient augmenter en¬
core cette innombrable famille. Le jeune
Médard est un aimable viennois dont le ca¬
ractère synthétise avec infiniment de force
et de pittoresque l’état d’äme de la bour¬
geoisie allemande, au début du dix-neuvième
siécle. II est à la fois irrésolu ct enthousiaste,
dévoré par de grandes espérances et accablé
par la tristesse de vivre, par la noble et dé¬
cevante mélancolie du romantisme a son
aurore. Exalté et réveur, épris des plus belles
chimères, mais n'ayant ni la force de les
réaliser, ni le triste courage de les désavouer,
Médard continue, on le voit, la race fatale
des Werther, des Manfred, des Lara.
Lui aussi, il est de ceux que lo destin a
marqué an front du signe redoutable. Comme
tous les réveurs de sa génération et de son
pays — T’action se passe en 1809 — il hait
Napoléon et a juré de délivrer la patrie cap¬
tive. Ce projet de régieide est d’aillours ins¬
pire en grande partie par Pimmense ameur
que Médard ressent pour la charmante ot
enigmatique prineesse Hélene, ennemie irré¬
ductible de Bonaparte. Celle-ci espere que
son flaneé tiendra le serment prononcé jadis
en une heure d’exaltation et de folie. En
frappant le nouveau Cesar. qui se trou#e
nale qui Tentoure, cette harmonie secrôte
et ultime de Prruvre, voilà ce qui enLons¬
titne le charmeret la rare beauté.
Le drame d Arthur Schnitzler se rattache
par la, en les renouvelant, aux plus nobles.
traditions de l’art idéaliste allemand.
Stanislas Rzewuski.