Else
31. Fraeulein
box 5/2
LALSAGE FRANGAISE
28 Juiliet 1929
655
Thomas Mann a plutöl vu dans ce geure un moyen
le traduire cerlaines de ses conceptions encore frag¬
metitaires ou cerlaines de ses idées tonjours si pro¬
Tondement originales.
Nous en dirons presque autant des cuvres de
Stefan Zweig, qui, comme beaucoup de productions
epiques actuelles, tiennent le milieu entre la nouvelle
ele roman.
T
(Cl. Rev. Rhénane)
Leonhard Frank
ire son amour conjugal, son bonheur et lui donnant
sür son interieur et sur sa Temme, jusqu'a des détails
de la dernière intimité; l’autre s’imprégnant entie¬
Mmmamumnummanesessahhmitite
reinent de ce bonheur, le faisant à la longue presque
(Cl. Rev. Rhénane)
siell.,, Puis c’est le retour du celibataire Karl, si bien
Stefan Zweig
inilié à la vie de son camarade qu’il peut se faire
passer pour Jui, qu’il en arrive à s’illusionner Jui¬
Nous ne pouvons que hommer ses meilleurs re¬
meine. D’auteur nous montre la jeune femme., dupe
eueils, par cxempie: &Amok, Novellen einer Leidens¬
le la supercherie de Karl? Qui oserait T’affirmer?
chafb, Ferwirrung der Gefühlen dond le recil: Pingl
mais en lout cas faisant peu à peu le jeu de Karl et
qaatre heures de la vie c’ane semme (!) est une fort
reprenant avec lui son ancien amour mis en veilleuse
belle nouvelle: c’est bien le moment eritique de la
depuis quatre longucs années et maintenant soudain
vie d’une femnne que Tauteur nous présenle: de cette
ranimé, plus conscient, plus compréhensif. Et puis
jeune veuve prise sondain d’un intèrei qui va jus¬
c’est la calastrophe: le retour du mari, le terrible
gu'au sacrifice pour un joueur anx abois, qu'elle ne
combat interieur qui se livre dans ces ämes frustes,
cohlhaft pas, mais qw’elle devine préi à se suieider
mais honnétes et, Finalement, l’héroique résolution
apres une forte perte, quselle s’est mis en téte de
sauver à tout prix, auquel elle sacrifie, en une nuil,
Tout dans celle nouvelle est finesse ei délicatesse,
Fortune et honneur pour Parracher à son mal ei qui,
ei ce sonl malheureusement ccs qualités si impor¬
des Taurore, se voil abandonnée. Ces deux caraclères,
tantes qu'elle perd à la scche et à l’écran; car la
celui de larfemme en qui s’éveille soudain Pamour¬
nonvelle en elle-méme n’a rien de banal, rien de
sacrifice, et celui du joneur invelere que rien, meme
faclice. On sent une émotion profonde, sincère dans
Pamour, F’arréte sur la pente fatale, sont rendus avec
cedrame de la vie, entre individus de condition infé¬
une telle puissance d’evocation, une telle finesse d’ob¬
rieure; ebcest peut-eire ce qui le rend plus impres¬
servalion, qu'ils se fixent à jamais dans la mémoire
sionnant et plus poignant que bien d’autres drames
et donnent à la nouvelle un sens humain et une
à grands fracas, parce que d’un bout à l’autre il
portée (ir'elle m’avait pas encore eus jusqu'à present.
est vrai; e’estene chose vue, une chose vécue.
La houvelle de Lconhard Frank Aurd #l dung est
Arnold Zweig, avec le talent delicat et sensible qui
deja trop connne en France par Padaplation sceni¬
le caractérise, a donné à la nouvelie Novelien um
que qu'en a faile J.-R. Bloch el par les reproduc¬
Glundia, Gerufeue Schatten un carackère d’intimité
Hons cinemalographiques qui Tonl vulgarisée, pour
d’un charme tout particulier. Ce jue Zweig excelle à
qweil soit nécessaire de nous y arrêter longtemps.
déerire, ce sonl ccs élats däme au moment d’une
Celle cuvre, une des rares nouvelles inspirées par la
erise qui mel à nn le véritable carackère des individus
guerre, Traite un sujet qui, à vrai dire, west pas tout
el deeide de loute une existence.
a fait nouveau puisqu'il sagit d’un prisonnier de
guerre, amt el compagiion de caplivilé d’un autre
Si Arnold Zweig a su exprimer dans ses nouvelles
prisonnier de guerre. qui est rapatrié avant son ca¬
celle tendance dominante de notre époque à recher¬
marade etqui devient Tamant de la Temme de co
cher jusque dans les plus menus détails ei dans les
dernier. Celui-ci revient aussi. Dilemme. Mais il ap¬
nnances les plus delicates ccqui constilue & l’äme 9
partenail à un veritable artiste et au fin psycholo¬
d’un étre humain, A. Frey a salisfail par les siennes
gue qir'est L. Frank d’éliminer ce que cetheme pou¬
à ce besoin de sensalions raffinées et extraordinai¬
vall avoir de mélodramatique pour en faire une
res. de mystérieux et d’excentrique qui sont le propre
delicale el forte étude psychologiquc.
de notre temps. Disciple de E. A. Poe, il a pour ainsi
dire eréé la Schauernovelle moderne, la nonvelle qui
Frank commence par nous présenter les deux amis
donne le frisson, en groupant dans un mème genre
parlant ensemble, s’epanchant, l’un contant à Fau¬
les effets de la ballade à faniômes et les molifs des
romans policiers d’un Edgad Wallace, auxquels il
ajoute cependant certaines observations psychologi¬
(1) Traduction Bournac et Hella, chez Attinger.
31. Fraeulein
box 5/2
LALSAGE FRANGAISE
28 Juiliet 1929
655
Thomas Mann a plutöl vu dans ce geure un moyen
le traduire cerlaines de ses conceptions encore frag¬
metitaires ou cerlaines de ses idées tonjours si pro¬
Tondement originales.
Nous en dirons presque autant des cuvres de
Stefan Zweig, qui, comme beaucoup de productions
epiques actuelles, tiennent le milieu entre la nouvelle
ele roman.
T
(Cl. Rev. Rhénane)
Leonhard Frank
ire son amour conjugal, son bonheur et lui donnant
sür son interieur et sur sa Temme, jusqu'a des détails
de la dernière intimité; l’autre s’imprégnant entie¬
Mmmamumnummanesessahhmitite
reinent de ce bonheur, le faisant à la longue presque
(Cl. Rev. Rhénane)
siell.,, Puis c’est le retour du celibataire Karl, si bien
Stefan Zweig
inilié à la vie de son camarade qu’il peut se faire
passer pour Jui, qu’il en arrive à s’illusionner Jui¬
Nous ne pouvons que hommer ses meilleurs re¬
meine. D’auteur nous montre la jeune femme., dupe
eueils, par cxempie: &Amok, Novellen einer Leidens¬
le la supercherie de Karl? Qui oserait T’affirmer?
chafb, Ferwirrung der Gefühlen dond le recil: Pingl
mais en lout cas faisant peu à peu le jeu de Karl et
qaatre heures de la vie c’ane semme (!) est une fort
reprenant avec lui son ancien amour mis en veilleuse
belle nouvelle: c’est bien le moment eritique de la
depuis quatre longucs années et maintenant soudain
vie d’une femnne que Tauteur nous présenle: de cette
ranimé, plus conscient, plus compréhensif. Et puis
jeune veuve prise sondain d’un intèrei qui va jus¬
c’est la calastrophe: le retour du mari, le terrible
gu'au sacrifice pour un joueur anx abois, qu'elle ne
combat interieur qui se livre dans ces ämes frustes,
cohlhaft pas, mais qw’elle devine préi à se suieider
mais honnétes et, Finalement, l’héroique résolution
apres une forte perte, quselle s’est mis en téte de
sauver à tout prix, auquel elle sacrifie, en une nuil,
Tout dans celle nouvelle est finesse ei délicatesse,
Fortune et honneur pour Parracher à son mal ei qui,
ei ce sonl malheureusement ccs qualités si impor¬
des Taurore, se voil abandonnée. Ces deux caraclères,
tantes qu'elle perd à la scche et à l’écran; car la
celui de larfemme en qui s’éveille soudain Pamour¬
nonvelle en elle-méme n’a rien de banal, rien de
sacrifice, et celui du joneur invelere que rien, meme
faclice. On sent une émotion profonde, sincère dans
Pamour, F’arréte sur la pente fatale, sont rendus avec
cedrame de la vie, entre individus de condition infé¬
une telle puissance d’evocation, une telle finesse d’ob¬
rieure; ebcest peut-eire ce qui le rend plus impres¬
servalion, qu'ils se fixent à jamais dans la mémoire
sionnant et plus poignant que bien d’autres drames
et donnent à la nouvelle un sens humain et une
à grands fracas, parce que d’un bout à l’autre il
portée (ir'elle m’avait pas encore eus jusqu'à present.
est vrai; e’estene chose vue, une chose vécue.
La houvelle de Lconhard Frank Aurd #l dung est
Arnold Zweig, avec le talent delicat et sensible qui
deja trop connne en France par Padaplation sceni¬
le caractérise, a donné à la nouvelie Novelien um
que qu'en a faile J.-R. Bloch el par les reproduc¬
Glundia, Gerufeue Schatten un carackère d’intimité
Hons cinemalographiques qui Tonl vulgarisée, pour
d’un charme tout particulier. Ce jue Zweig excelle à
qweil soit nécessaire de nous y arrêter longtemps.
déerire, ce sonl ccs élats däme au moment d’une
Celle cuvre, une des rares nouvelles inspirées par la
erise qui mel à nn le véritable carackère des individus
guerre, Traite un sujet qui, à vrai dire, west pas tout
el deeide de loute une existence.
a fait nouveau puisqu'il sagit d’un prisonnier de
guerre, amt el compagiion de caplivilé d’un autre
Si Arnold Zweig a su exprimer dans ses nouvelles
prisonnier de guerre. qui est rapatrié avant son ca¬
celle tendance dominante de notre époque à recher¬
marade etqui devient Tamant de la Temme de co
cher jusque dans les plus menus détails ei dans les
dernier. Celui-ci revient aussi. Dilemme. Mais il ap¬
nnances les plus delicates ccqui constilue & l’äme 9
partenail à un veritable artiste et au fin psycholo¬
d’un étre humain, A. Frey a salisfail par les siennes
gue qir'est L. Frank d’éliminer ce que cetheme pou¬
à ce besoin de sensalions raffinées et extraordinai¬
vall avoir de mélodramatique pour en faire une
res. de mystérieux et d’excentrique qui sont le propre
delicale el forte étude psychologiquc.
de notre temps. Disciple de E. A. Poe, il a pour ainsi
dire eréé la Schauernovelle moderne, la nonvelle qui
Frank commence par nous présenter les deux amis
donne le frisson, en groupant dans un mème genre
parlant ensemble, s’epanchant, l’un contant à Fau¬
les effets de la ballade à faniômes et les molifs des
romans policiers d’un Edgad Wallace, auxquels il
ajoute cependant certaines observations psychologi¬
(1) Traduction Bournac et Hella, chez Attinger.