3. Sterben
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LE LIVRE A PARIS.
700
C’est bien à denx agontes que vous assisterez en lisant ce livre
funébre. Un phthisique s’en va lentement d’ou l’on ne revient
—
pas. Une maitresse très dévonée et qui l'aime profondément¬
c’est une Viennoise, et il parait que c’est tout dire—l'assiste et
le soigne avec une obstination et une douceur inaltérables. La
succession des sentiments chez ces deux étres qui s’adorent,
voilà ce que l'auteur a voulu nous montrer, et ce qu'il nous a
fait voir, en effet, avec une minutie très heureuse et avec un air
de vérité incomparables. II ya la parallélement, l’agonie
physique et morale du malade et l’agonie morale de la jeune
femme, dans tout leur développement, et comme suivies pas à
pas.
Le jeune homme sait qu'il en a pour un an, au plus. L’arrêt
a Cchappé à un niédecin illustre autant que spécialiste, qui ne
peut pas s’étre trompé. Une effroyable torture commence
ppur lui, une révolte sans cesse grandlissante contre la destinée,
et surtout, ce qui est admirablement exprimé, avec une variété
extrème de moyens, par M. Schnitzler, une jalousie furieuse
à l’égard de tout ce qui vit, de tout cc qui est jeune, de tout
ce qui s’élance dans l’avenir, de tout ce qu’il sait qui restera
après lui sur la terre quand il sera descendu dans l’ombre
Sternelle. Ces gens qui se promènent, qui courent, qui cau¬
sent, qui discutent, qui s’ennuient, qui ne connaissent pas
leur bonheur, il les hait d’une haine qui pen à peu s’exaspère
et s'affolle.
Et peu à peu il s’aperçoit qu’à l’égard de sa maitresse il a les
memes sentiments. Elie est trop fraiche, elle est trop belle,
elle est trop saine, elle est trep jeune; ils vivent trop, dune
vie insolemment radieuse, ses beaux cheveux blonds, ou
semble descendre et séjourner amoureusement le soleil.
Elle lui a promis, dans le premier moment d’exaltation, qu'elle
ne lui survivrait pas. HI l'a traitée de folle et lui a commandé
de vivre, ne füt-ce que pour que quelque chose reste de lui, pour
qu'il puisse vivre encore dans son sonvenir, dans les intimités
mélancoliques de son regret.
Mais, les jours passant, les mois s’écoulant, et approchant
le terme fatal, c’est à cette promesse funebre de sa maitresse
qu’il s'attache et qu’il s’accroche lächement, comme à une
consolation.
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LE LIVRE A PARIS.
700
C’est bien à denx agontes que vous assisterez en lisant ce livre
funébre. Un phthisique s’en va lentement d’ou l’on ne revient
—
pas. Une maitresse très dévonée et qui l'aime profondément¬
c’est une Viennoise, et il parait que c’est tout dire—l'assiste et
le soigne avec une obstination et une douceur inaltérables. La
succession des sentiments chez ces deux étres qui s’adorent,
voilà ce que l'auteur a voulu nous montrer, et ce qu'il nous a
fait voir, en effet, avec une minutie très heureuse et avec un air
de vérité incomparables. II ya la parallélement, l’agonie
physique et morale du malade et l’agonie morale de la jeune
femme, dans tout leur développement, et comme suivies pas à
pas.
Le jeune homme sait qu'il en a pour un an, au plus. L’arrêt
a Cchappé à un niédecin illustre autant que spécialiste, qui ne
peut pas s’étre trompé. Une effroyable torture commence
ppur lui, une révolte sans cesse grandlissante contre la destinée,
et surtout, ce qui est admirablement exprimé, avec une variété
extrème de moyens, par M. Schnitzler, une jalousie furieuse
à l’égard de tout ce qui vit, de tout cc qui est jeune, de tout
ce qui s’élance dans l’avenir, de tout ce qu’il sait qui restera
après lui sur la terre quand il sera descendu dans l’ombre
Sternelle. Ces gens qui se promènent, qui courent, qui cau¬
sent, qui discutent, qui s’ennuient, qui ne connaissent pas
leur bonheur, il les hait d’une haine qui pen à peu s’exaspère
et s'affolle.
Et peu à peu il s’aperçoit qu’à l’égard de sa maitresse il a les
memes sentiments. Elie est trop fraiche, elle est trop belle,
elle est trop saine, elle est trep jeune; ils vivent trop, dune
vie insolemment radieuse, ses beaux cheveux blonds, ou
semble descendre et séjourner amoureusement le soleil.
Elle lui a promis, dans le premier moment d’exaltation, qu'elle
ne lui survivrait pas. HI l'a traitée de folle et lui a commandé
de vivre, ne füt-ce que pour que quelque chose reste de lui, pour
qu'il puisse vivre encore dans son sonvenir, dans les intimités
mélancoliques de son regret.
Mais, les jours passant, les mois s’écoulant, et approchant
le terme fatal, c’est à cette promesse funebre de sa maitresse
qu’il s'attache et qu’il s’accroche lächement, comme à une
consolation.