Me
22 Djundargus
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940
REVUE DES DEUX MONDES.
A Berlin, la principale nouveauté de la saison a été une & tragi¬
comédie berlinoises de M. Gérard Hauptmann, intitulée Zes Nats.
C’est une cuvre aussi différente que possible du mélodrame histo¬
rique viennois de M. Schnitzler: désordonnée, confuse, souvent
maladroite, mais tout imprégnée de cette profonde vérité humaine
qui manquait à T’action comme aux caractères du Jeune Médard.
Aussi bien le lecteur français n’est-il pas sans savoir que l’auteur
des Tisserands et de l’Assomption d’Hannele Matern occupe aujour¬
d’hui la première place parmi les maitres les plus applaudis de
la scène allemande: à Paris méme, d’excellentes traductions de ces
deux pièces par M. Jean Thorel nous ont accoutumés à admirer un
talent qui rachetait à nos yeux, par son originalité et l’intensité de
son 6motion poétique, l’apparente gaucherie #théatralen de ses pro¬
cédés. Mais peut-étre cette originalité foncière du talent de M. Haupt¬
mann l'a-t-elle conduit, pendant de longues années, à négliger ou à
dédaigner trop complétemert des principes d’esthétique profession¬
nelle ou il ne vonlait voir que de simples routines indignes de Jui,
tandis qu'en réalité nulle vie dramatique n’est possible sans enx?
Toujours est-il que, après l’éclatant succès de ses premières pièces,
chacune de ses tentatives zuivantes a déconcerté le public allemand.
Ni sa & tragi-comédie du Coy Rouge, ni son Paurre Nenri, ni le
singulier & conte de fées v qu’il a fait représenter naguère sous ce
titre non moins imprévu: E! Pippa danse! n’ont obtenu l’accueil
qu'avaient recu précédemment des ouvragès d’une invention déja
bien étrange, tels que la Cloche engloutie on la susdite Assomption
d'Hannele Matern. Te#t le monde, pourtant, s’accordait à reconnaitre
qu'il y avait, dans ces pièces de plus en plus & ratées, wune qualité
littéraire plus personnelle et plus haute que dans les anciennes pro¬
ductions de l’auteur. L’observateur et le poête, chez lui, n’avaient
point cessé de grandir, mais an détriment de l’écrivain de théätre; et
le bruit commençait à se répandre que M. Hauptmann, découragé de
cette série ininterrompue de & succès d’estime v on de véritables
echecs, allait dorénavant se consacrer tout entier anx genres du roman
et de la nouvelle.
M avait en effet publié, il F a quelques mois, un grand roman ou
des discussions philosophiques et sociales assez fastidieuses s’entre¬
coupaient de descriptions, d’analyses, d’effusions lyriques pour lo
moins égales à ce que ses drames d’autrefois avaient contenu de plus
excellent. Mais sans doute ce travail ne lui était apparn que comme
une diversion, et sa nouvelle & tragi-comédie berlinoisen est venue,
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REVUE DES DEUX MONDES.
A Berlin, la principale nouveauté de la saison a été une & tragi¬
comédie berlinoises de M. Gérard Hauptmann, intitulée Zes Nats.
C’est une cuvre aussi différente que possible du mélodrame histo¬
rique viennois de M. Schnitzler: désordonnée, confuse, souvent
maladroite, mais tout imprégnée de cette profonde vérité humaine
qui manquait à T’action comme aux caractères du Jeune Médard.
Aussi bien le lecteur français n’est-il pas sans savoir que l’auteur
des Tisserands et de l’Assomption d’Hannele Matern occupe aujour¬
d’hui la première place parmi les maitres les plus applaudis de
la scène allemande: à Paris méme, d’excellentes traductions de ces
deux pièces par M. Jean Thorel nous ont accoutumés à admirer un
talent qui rachetait à nos yeux, par son originalité et l’intensité de
son 6motion poétique, l’apparente gaucherie #théatralen de ses pro¬
cédés. Mais peut-étre cette originalité foncière du talent de M. Haupt¬
mann l'a-t-elle conduit, pendant de longues années, à négliger ou à
dédaigner trop complétemert des principes d’esthétique profession¬
nelle ou il ne vonlait voir que de simples routines indignes de Jui,
tandis qu'en réalité nulle vie dramatique n’est possible sans enx?
Toujours est-il que, après l’éclatant succès de ses premières pièces,
chacune de ses tentatives zuivantes a déconcerté le public allemand.
Ni sa & tragi-comédie du Coy Rouge, ni son Paurre Nenri, ni le
singulier & conte de fées v qu’il a fait représenter naguère sous ce
titre non moins imprévu: E! Pippa danse! n’ont obtenu l’accueil
qu'avaient recu précédemment des ouvragès d’une invention déja
bien étrange, tels que la Cloche engloutie on la susdite Assomption
d'Hannele Matern. Te#t le monde, pourtant, s’accordait à reconnaitre
qu'il y avait, dans ces pièces de plus en plus & ratées, wune qualité
littéraire plus personnelle et plus haute que dans les anciennes pro¬
ductions de l’auteur. L’observateur et le poête, chez lui, n’avaient
point cessé de grandir, mais an détriment de l’écrivain de théätre; et
le bruit commençait à se répandre que M. Hauptmann, découragé de
cette série ininterrompue de & succès d’estime v on de véritables
echecs, allait dorénavant se consacrer tout entier anx genres du roman
et de la nouvelle.
M avait en effet publié, il F a quelques mois, un grand roman ou
des discussions philosophiques et sociales assez fastidieuses s’entre¬
coupaient de descriptions, d’analyses, d’effusions lyriques pour lo
moins égales à ce que ses drames d’autrefois avaient contenu de plus
excellent. Mais sans doute ce travail ne lui était apparn que comme
une diversion, et sa nouvelle & tragi-comédie berlinoisen est venue,