II, Theaterstücke 11, (Reigen, 0), Reigen. Zehn Dialoge, Seite 24

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dont te talentest tres varié, semblesurtout á son
ise dans les petits tableaux, dans les courtes
scènes, nouvelles ou piécettes. Personne, mème
à Paris, ne traite comme lui le dialogue ou la
comédie de paravent. Nul ne sait, avec plus de
souplesse et de süreté, refléter le caractère ou
Thumeur d’un personnage dans une phrase
bréve et nuancée; nul ne sait mienx, en gardant
Tharmonie du dialogue, donner ächaque interlo¬
cuteur le langage qui convient á son röle. Sans
doute, ce n’est pas du grand art, mais c’est un
art achevé, toujours agréable, souvent exquis.
Aussi bien, Arthur Schnitzler ne se contente
pas d’aligner des répliques divertissantes. IIy a
tonjours, sinon dans ses ceuvres, du moins entre
elles et derrière elles, matière à réflexion. Mais
il suggère sa philosophie avec une infinie déli¬
catesse, il n'a rien d’un censeur ou d’un théori¬
cien pédant. La moralité de ses fables est silen¬
cieuse: elle ne s’impose pas au cours de la lec¬
ture ou du spectacle. Elle se propose seulement,
plus tard, à ceux qui aiment à revenir en pensée
sur leurs amusements. Ainsi les fusées d’une
féte, en retombant à demi-éteintes, improvisent
leurs plus beaux dessins.
Arthur Schnitzler avait donné dans ses
Heures de Wie quatre pièces en un acte, trés
dissemblables et que réumssait pourtant l’invi¬
sible lien d’une inspiration commune. Son nou¬
veau livre offre quelque chose de pareil: il com¬
prend dix dialogues — parfois un peu pimentés
et nous présente dix personnages. Dix fois
c’est le méme sujet, dix fois (au moins) le mème
geste: T’amour. Chaque personnage y parait
deux fois dans dans le röle éternel et passager
d’amant ou d’amante, par une combinaisen
d’une gräce mathématique. Les dix personnages
sont: la fille Léocadie, un tourlourou, une sou¬
brette, le fils de la maison, une femme mariée,
son mari, une grisette, un poéte, une actrice, et
un officier noble. Le premier dialogue s’échange
sur un trottoir garni de bancs, au bord du petit
Danube, devant le pont de l’Augarten, entre la
fille et le tourlourou; le second sur les pelou¬
ses et parmi les buissons du Prater, un diman¬
che soir, entre le tourlourou et la soubrette; le
troisième entre la soubrette et son jeune maitre
(1) Arthur Schnitzler: Reigen. — Vienne, Wiener Ver¬
lag, 1903.
Alfred, dans la chambre de celui-ci; le qua¬
trième entre Alfred et Emma dans une garçon¬
nière de la rue Schwind; le cinquieme entre
Emma et Charles son époux, dans leur chambre
conjugale; le sixième entre Charles et une gri¬
sette, en scabinet particulier; puis cest la gri¬
sette qui revient en scène avec un poete drama¬
uquez puis le poete qui emmene aux environs
de Vienne, dans une auberge pittoresque, une
actrice du Burgtheater; ensuite l’actrice reçoit
dans son intimité, à Vienne, un officier noble;
enfin l’officier noble, au lendemain d’une forte
beuverie, se réveille tout surpris dans la cham¬
bre, empestée de pétrole, de Léocadie.
Chacun de ces dialogues est un modele de
malicieuse observation et gagne encore par tout
ce qui le distingue des autres, car jamais M.
Schnitzler n’a été plus adroitement subtil pour
modifier par le détail une situation dix fois ré¬
pétéc. Mais ce qu'il yade tres original et de
tres piquant dans ce petit volume, c’est juste¬
ment la forme du d dialogue cyclique . Cette
forme exprime toute sa moralité: n'est-ce pas
Tapplication aux choses du cceur des tourbil¬
lons cartésiens, et le livre ne pourrait-il pas
prendre pour épigraphe le dernier vers de Faust,
à peine corrigé:
Des Ewigweibliche zicht uns herum.
JzaN Cnawratolyr.