11. Reigen
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LE THEATRE
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Ronde aient pu choquer à leur apparition, tant les plus hardis
d’entre eux ont encore de mesure. C’estlce tact particulier
qui conférc aux épisodes leur piquant. Un homme du mende,
observateur sagace, et qui a beaucoup vécu dans une vieille
capitale ou la course au plaisir fut toujours assez effrénée,
nous communique les résultats de son expérience. Il est désa¬
busé, spirituel, souligne de traits mordants ses tableaux de
mceurs, parfois pousse un peu la peinture à la charge, mais,
en dépit de ses railleries, garde un fond sentimental, car il est
d’une ville ou la tendresse et la candeur s’accordent avecle
vice mème: la petite fleur bleue et l’ceillet poivré composent
le bouquet viennois.
C’est madame Pitoéff qui représente l’Eternel Féminin sous
ses différents masques. Sauf que son léger accent, en la ren¬
dant immédiatement reconnaissable, crée, dans toutes les
situations, une identité de personne qui est précisément à
l’opposé de la diversité qu'il s’agit de montrer, presque tout
dans son interprétation nous a paru admirable. L’art du
comédien, parfois, ne se manifeste jamais mienx que lors¬
qu'if doit tourner, à chaque instant, un obstacle matériel
imtpossible à surmonter.
La mise en scène est l'une des plus intelligentes que Pitoëff
ait réalisées.
M’est-il permis de rappeler que, voici déjà cing ans, dans un
essai intitulé l'Amour qui n’ose pas dire son nom, l’auteur de
ces lignes fut le premier en France à tenter une étude d’ensem¬
ble sur les formes inverties du désir dans leurs rapports avec
la littérature de ce temps? Or, quoique mon objet principal
füt l’inversion masculine, j'avais été amené alors à faire allu¬
sion, dans une note (page 71), à la Prisonnière de M. Edouard
Bourdet. Je faisais remarquer que, dans la Prisonnière (1926),
comme dans Lucien, le roman de M. Binet-Valmer (1910), le
probléme était posé d’un tel biais que le centre nous en demeu¬
rait caché. Dans les deux cas, ce qui nous est montré, c’est
le conflit familial qui résulte de l’anomalie, et non l’ano¬
malie en ehméme. On sait que, dans la Prisonnière, la per¬
sonne responsable du trouble, la geölière, si je puis la nommer
ainsi, ne paraft pas. A aucun moment elle n’est réunie
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Ronde aient pu choquer à leur apparition, tant les plus hardis
d’entre eux ont encore de mesure. C’estlce tact particulier
qui conférc aux épisodes leur piquant. Un homme du mende,
observateur sagace, et qui a beaucoup vécu dans une vieille
capitale ou la course au plaisir fut toujours assez effrénée,
nous communique les résultats de son expérience. Il est désa¬
busé, spirituel, souligne de traits mordants ses tableaux de
mceurs, parfois pousse un peu la peinture à la charge, mais,
en dépit de ses railleries, garde un fond sentimental, car il est
d’une ville ou la tendresse et la candeur s’accordent avecle
vice mème: la petite fleur bleue et l’ceillet poivré composent
le bouquet viennois.
C’est madame Pitoéff qui représente l’Eternel Féminin sous
ses différents masques. Sauf que son léger accent, en la ren¬
dant immédiatement reconnaissable, crée, dans toutes les
situations, une identité de personne qui est précisément à
l’opposé de la diversité qu'il s’agit de montrer, presque tout
dans son interprétation nous a paru admirable. L’art du
comédien, parfois, ne se manifeste jamais mienx que lors¬
qu'if doit tourner, à chaque instant, un obstacle matériel
imtpossible à surmonter.
La mise en scène est l'une des plus intelligentes que Pitoëff
ait réalisées.
M’est-il permis de rappeler que, voici déjà cing ans, dans un
essai intitulé l'Amour qui n’ose pas dire son nom, l’auteur de
ces lignes fut le premier en France à tenter une étude d’ensem¬
ble sur les formes inverties du désir dans leurs rapports avec
la littérature de ce temps? Or, quoique mon objet principal
füt l’inversion masculine, j'avais été amené alors à faire allu¬
sion, dans une note (page 71), à la Prisonnière de M. Edouard
Bourdet. Je faisais remarquer que, dans la Prisonnière (1926),
comme dans Lucien, le roman de M. Binet-Valmer (1910), le
probléme était posé d’un tel biais que le centre nous en demeu¬
rait caché. Dans les deux cas, ce qui nous est montré, c’est
le conflit familial qui résulte de l’anomalie, et non l’ano¬
malie en ehméme. On sait que, dans la Prisonnière, la per¬
sonne responsable du trouble, la geölière, si je puis la nommer
ainsi, ne paraft pas. A aucun moment elle n’est réunie