II, Theaterstücke 4, (Anatol, 8), Anatol, Seite 591

tol- zyklus
4.9. An
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MERCVRE DE FRANCE -XI-1932
qui gouverne le monde à la ronde.
Est-ce une certaine sécheresse qui caractérise les croquis
de Schnitzler? Il est assez remarquable de noter qu'aucune
sentimentalité n'y apparaît. Aucun sentiment ne mène les uns
vers les autres les personnages de ce ballet érotique et ni le
regret ni la mélancolie ne paraissent en eux quand ils se
quittent. Leurs séparations ne constituent jamais des aban¬
dons. Personne ne souffre dans ce petit univers où ne règnent
que les sens, et c'est ce qui explique la monotonie de l'ou¬
vrage, monotonie préméditée, dont l’auteur veut suggérer l'im¬
pression comme il le fait bien voir en écrivant dans sa der¬
nière scène ces mots qui constituent une sorte de moralité :
c'est incroyable comme au fond toutes les femmes se res¬
semblent.
Elles se ressemblent d'autant plus au cours de la représen¬
tation que l'on vient de nous offrir, qu'elles sont interprétées
par la seule Mme Pitoëff, dont j'ai apprécié le jeu plus que
je n'ai coutume de le faire. J'ai toujours dit que cette comé¬
dienne n'était point faite pour les grands premiers rôles : ici
elle a cinq petits rôles et dans presque tous se montre char¬
mante. Il en va de même pour M. Pitoëff : quand il consent à
ne paraître que quelques minutes à la fin d'une soirée, il fai¬
une impression tout à fait forte. Ses défauts mêmes le servent
et prennent du relief. Tout concourt donc à faire de ces dix
tableaux un spectacle digne d'un succès légitime. Les acteurs,
les décors, le texte, où il faut bien revenir enfin,
On veut relier à la tradition du Théâtre Libre la Ronde :
Antoine n'a pas voulu la jouer et on en fait presque un titre
de gloire à l'ouvrage. Quelques-uns prennent pour une nou¬
veauté cette façon de considérer les choses de l'amour d'une
manière si sèche et si dénuée. Il ne me semble pas qu'en 1913,
ni même en 1912, ce fut une attitude particulièrement inédite,
en tous cas on a, depuis lors, vu et lu tellement plus hardi
dans ce genre que l'on perd de vue ce qu'il y eut là d'inno¬
vation.
Cependant il demeure rare de voir au cours d'un même
spectacle dix couples s'aimer sous nos yeux, ou presque.
Pourquoi pas douze ? Je me posais la question en quittant le
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REVUE DE LA QUINZAINE
théâtre. Il était tard. Minuit sonnait et je me disais que si
Schnitzler avait écrit deux scènes de plus, cela aurait donné
l'occasion d'un mot qu'avec un peu de chance et d'esprit on
eût rendu fort spirituel à cette minute précise.
PIERRE LIVRE.
HISTOIRE
Lucie Delarue-Mardrus : Le Bâtard, Vie de Guillaume le Conquérant,
Fasquelle. — Octave Aubry : L'Impératrice Eugénie. A. Fayard et Cie.
Mémento.
Nous venons un peu tardivement, bien malgré nous, au
pittoresque ouvrage de Mme Lucie Delarue-Mardrus : Le Ba¬
tard, Vie de Guillaume le Conquérant. Faut-il dire : His-
toire romancée? Ce « romancement », alors, si j'en crois la
couleur ici prodiguée, en ce qui concerne les lieux, par exem¬
ple, peut avoir des motifs sortant du banal. N'ayant pas l'hon¬

a