VII, Verschiedenes 11, 1915–1917, Seite 17

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Miscellaneous
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Une protestation d'Arthur Schnitzler
Comme si ce n’était pas assez des batail¬
les d'intellectuels et de leurs paroles d'or¬
gueil et de violence, il se trouve à présent
des publicistes sans scrupules qui, pour
alimenter l'incendie, ne craignent pas
d'y jeter les rares écrivains restés calmes
en dehors de la mêlée. Ils vont jusqu'à
leur prêter parfois des pensées malfai¬
santes, qui sont des semences nouvelles de
haine. L'illustre romancier viennois Arthur
Schnitzler est une de leurs victimes. On
vient de lui attribuer dans des journaux
russes les plus étranges propos sur les maî¬
tres de la littérature russe, anglaise et fran¬
co-belge. Il nous écrit pour les démentir.
Il proteste qu'aucune guerre ne saurait
atteindre l'impartialité de son esprit et
son jugement équitable sur les œuvres
C'est pour nous un devoir confraternel de
publier sa protestation, comme ce le sera
toujours de contribuer, toutes les fois que
nous le pourrons, à tout acte qui montre,
au milieu de la démence des nations en lut¬
te, l'unité persistante de la pensée humaine
et l'union secrète de ses meilleurs repré¬
sentants.
15 décembre 1914.
Romain ROLLAND

« J'apprends indirectement par des amis
russes qu'on a publié dans des journaux de
Pétersbourg de soi-disant propos de moi
sur Tolstoi, Maeterlinck, Anatole France et
Shakespeare. Ils sont d'une absurdité si fan¬
tastique qu'aucun homme qui me connaît
n'y ajouterait foi, en temps ordinaire ; mais
dans un monde égaré, comme celui d'au¬
jourd'hui, par l’excès de la haine et par la
frénésie du mensonge, ils pourraient ne pas
se invraisemblables même à des gen¬
non dépourvus de jugement. De tels essais
d'excitation, entrepris loin par derrière le
front des armées qui combattent loyale¬
ment, sous le couvert d'une presse irrespon¬
sable, par les maraudeurs du patriotisme,
sont une des caractéristiques, et peut-être
la plus répugnante, de cette guerre. Même
le plus ridicule de ces essais pourrait, s'il
réussit, rendre très difficile à ceux qui en
sont victimes de dissiper plus tard le mal¬
entendu C'est pourquoi ce serait une faute,
si je négligeais ceux-ci, à cause de leur stu
pidité.
La teneur exacte des propos qui me sont
attribués ne m'est pas encore connue ; mais
leur sens et leur publication ne sont pas
douteux. Et puisque, dans les circonstances
présentes, il peut se passer beaucoup de
temps avant que j'entre en possession de
l’article original, je dois me limiter provi¬
soirement à cette déclaration que des pro¬
pos du genre de ceux qui m'ont été publi¬
quement attribués n'ont jamais été pronon
cés par moi, et n'auraient jamais pu l'être,
à aucun moment, ni en temps de paix, ni
en temps de guerre, vu ma façon de penser.
A vrai dire, il est un peu humiliant
pour qui a su toute sa vie éviter jalouse¬
ment le mauvais goût de se commenter
soi-même, de devoir, pour la première fois,
donner l'assurance explicite que le beau
sera pour lui toujours le beau, que le grand
era toujours le rand, — même s'ils appar¬